À l’occasion de leur passage à Paris le 7 juin au Nouveau Casino, nous avons réalisé la première interview de HAEVN en France. Découvrez le duo néerlandais qui a sorti leur premier album “Eyes Closed” le 25 mai dernier.
Marijn Van Der Meer et Jorrit Kleijnen sont tous deux de Hollande et compose le duo HAEVN basé à Amsterdam.
Jorrit, peux-tu présenter l’histoire derrière ce duo ?
Je suis producteur de bandes originales, j’écris pour des films et il y a 4 ans, je travaillais pour un projet et le réalisateur m’a demandé de reproduire une bande que j’avais déjà réalisée pour en faire un morceau. Je lui ai répondu ” Ce n’est pas si simple, je compose pour faire une bande mais je ne peux composer un morceau entier seul”. J’étais persuadé que je n’y arriverais pas. Puis, on m’a présenté à Marijn, il venait de recevoir mon extrait et enregistrait les vocales dans son propre studio. Quand il m’a renvoyé la topline, j’étais bluffé. C’était incroyable le timbre et le rendu de sa voix.
À la suite de ce moment, on a commencé à collaborer ensemble. Il existait une sorte de “magie” entre nous lors des phases créatives. Marijn était typiquement l’auteur-compositeur tandis que j’étais le producteur de bandes originales sans vocales. Ce qui nous a tout de suite lié, était cet échange créatif, musicalement parlant on se complétait. C’était très intuitif, naturel et humble, on a de suite trouvé notre rythme.
Un jour, on a reçu un appel en provenance de la Suède. L’entreprise Volvo réagissait à un des morceaux que l’on avait composés : “Ce que vous venez de produire est le futur son qui accompagnera la nouvelle campagne Volvo” .
En un appel tout venait de changer. On passait de “deux amis faisant de la musique” à “une grande marque (Volvo) souhaite utiliser votre musique pour un spot international.” Je me rappelle, on s’est regardé avec Marijn et on s’est dit “On devrait faire quelque chose de plus grand !”
https://www.youtube.com/watch?v=uyg7aL6Uz-k
Et c’est comme cela qu’ HAEVN est né ?
Marijn: Exactement, on a démarré le groupe HAEVN à la suite de cette histoire et j’ai quitté mon emploi. Je travaillais en tant qu’annonceur / rédacteur, un jour, ils me disent ” On a un créneau pour un spot BMW, as-tu quelque chose qui pourrait correspondre ?” Avec Jorrit, on a réessayé une composition, ils ont tout de suite adhéré et décidé de synchroniser le morceau avec le spot.
De ce fait le second morceau que l’on a réalisé ensemble a aussi été une grosse synchronisation, particulièrement aux Pays-Bas. Toutes les stations radios diffusaient ces deux morceaux.
Jorrit: À ce moment, tu dois choisir entre le fait de te consacrer pleinement à une carrière ou revenir à la normalité. De plus, quand tu commences un projet musical, tu dois disposer d’autres maquettes, d’un album et ensuite te présenter officiellement. Cela a été tout le contraire, nous avons fait un “sold-out” sur une grosse salle aux Pays-Bas avec seulement 2 titres. On en revenait pas avec Marijn, on ne comprenait pas cet “emballement” .
Puisque les personnes qui nous suivent ont une attente, nous devons extraire le meilleur de nous dans ce premier album.
Et ensuite vous avez rencontré Tim Bran ?
Jorrit: Tout à fait, on a travaillé avec le producteur Tim Bran (Birdy / London Grammar / James Morrison). D’ailleurs cela a été un coup de chance, on avait peu d’argent, on ne pouvait pas se permettre de ne choisir qu’un seul producteur. Si cette collaboration ne donnait pas un bon résultat, nous n’aurions pas pu continuer. Lorsqu’on a recherché un producteur, on regardait les différents styles et en entendant London Grammar, on s’est tout de suite dit: “C’est avec cette personne que l’on doit travailler, ce rendu est exceptionnel.”
Au final, il a réalisé un très bon mixage et master. C’était un beau mariage, plein d’harmonie.
Comment s’est passé la suite après l’emballement autour de vos deux premiers morceaux ?
Marijn: En fait, cela nous a permis de réaliser la chance que l’on a eu d’avoir un départ si important. Il faut se l’avouer, beaucoup d’artistes aimeraient avoir les opportunités de lancement que l’on a eu. Bien sur, après il faut enchaîner, on a mis 2 années à réaliser l’album parce que l’on avait à l’esprit: ” Si on signifie quelque chose aujourd’hui, on doit prendre notre temps, ne pas se précipiter. Puisque les personnes qui nous suivent ont une attente, nous devons extraire le meilleur de nous dans ce premier album.”
L’idée était de fournir aux auditeurs un support pour leurs émotions.
Toute la communication autour d’ “Eyes Closed” comme filmer des personnes en train d’écouter votre album les yeux fermés et partager une anecdote reliée à l’émotion qu’ils ressentent. Était-ce votre idée ou celle d’une agence ?
Marijn: Le titre de ce premier album reflète ce que l’on voulait partager avec les auditeurs. On souhaitait que les gens écoutent tout en se laissant porter et puissent partager leur ressenti.
Bien sur, chacun des titres signifie une émotion ou se réfère à une anecdote pour nous. Pour autant, c’est tellement plus intéressant de découvrir les réactions des gens et ceux à quoi ils associent nos morceaux.
C’est avec Warner que nous avons mis en place ces courtes vidéos dans lesquelles les personnes partageraient leur ressenti à propos d’un de nos morceaux. C’est une manière originale de promouvoir notre musique, ce sont des instants uniques, personne ne possédera la même histoire derrière un de nos titres. Cet album a été conçu comme une bande originale, sauf qu’au lieu de toucher un public, elle touchera une vie. Il y aura de multiples façons de l’interpréter et c’est cela qui nous a animés dans sa conception.
Comment avez-vous réagi après avoir reçu ces vidéos, ces histoires différentes, parfois très fortes ?
Jorrit: Nous étions très heureux car c’est exactement ce que l’on espérait. Certains artistes “enferment” le public dans des cases en écrivant des paroles qui doivent être interprétées d’une seule manière. Avec HAEVN c’est différent puisque nous venons du milieu des compositeurs de bandes originales; on aime voir les multiples interprétations de gens qui écoutent.
Comme précédemment évoqué, l’idée était de fournir aux auditeurs un support pour leurs émotions.
Alors oui, nous étions très ému lorsqu’on a visionné les courtes vidéos envoyées. C’est touchant, encore plus quand on voit que ce sont des personnes du monde entier qui partagent leurs anecdotes dans leur langue maternelle; Cela crée une toile et des connexions avec les gens, ce qui semble disparaître aujourd’hui.
Pendant une heure on “jam” en quête d’un passage, d’une sorte de “petit miracle” parfait que l’on gardera; Que ce soit un instant de 2 sec comme de 10 sec…
Qu’est-ce qui vous a fait aimer la musique ?
Jorrit: “Le roi lion” , principalement le moment où le père de “Simba” meurt. (Il reproduit la musique qui passe sur cette scène)
Étant petit, je pleurais devant cette scène, l’atmosphère que provoquait la musique rendait la scène suspendue. Puis j’ai aussi été ému devant Pearl Harbor, Gladiator et j’ai compris que c’était le compositeur qui avait provoqué cette émotion chez moi. Hans Zimmer est l’homme qui m’a donné envie de faire de la musique, je voulais lui ressembler, avoir cette capacité à transporter les gens.
En Hollande, il existe une école très réputée, elle est spécialisée dans la formation de compositeur pour film; Seules 5 personnes par promotion peuvent disposer de cet enseignement prestigieux. J’ai fais cette école et je ne regrette pas, j’ai énormément appris et j’ai développé d’autres manières d’appréhender la musique. (sourires)
Concernant mes influences, je suis très attaché à Leonard Cohen, Bruce Springsteen ou Sting; Pour moi ce sont des artistes qui avaient tout compris, ils envisageaient la musique différemment et prenaient le temps de la décortiquer.
Marijn: Depuis petit, je jouais du piano tout en essayant de reproduire ce que je pouvais entendre à la radio. Après cela, j’essayais de produire mes propres morceaux, j’allais de plus en plus loin dans ma démarche et j’apprenais de mes erreurs. Ensuite, je me suis mis à la guitare pendant quelque temps puis j’ai repris le piano. Depuis tout jeune, ma façon de composer ou de jouer a toujours été intuitive, je n’ai jamais fait de solfège ou appris la musique. C’est un peu comme si “mes mains se baladaient seules sur l’instrument tout en trouvant des accords etc.”
Cela m’amène à cette question: Comment se déroulent vos phases de composition ?
Jorrit: On passe notre temps à improviser, nous faisons en sorte que Marijn soit dans les meilleures conditions possibles; De ce fait on n’écrit pas à l’avance, son timbre naturel est très important. La seule chose que l’on respecte est de faire en sorte que son micro soit parfait et dispose de la reverb nécessaire comme pour Hannah de London Grammar.
Casques sur la tête, pendant une heure on “jam” en quête d’un passage, d’une sorte de “petit miracle” parfait que l’on gardera; Que ce soit un instant de 2 sec comme de 10 sec, une fois qu’on là, on sait construire autour. (Cela peut être un son, une émotion, un passage vocal… ndlr)
Marijn: Tout se fait grâce à l’inconscient, on se laisse porter par la musique, là où notre subconscient veut nous emmener. Pour exemple, les paroles de mes chansons viennent naturellement en réaction avec l’atmosphère musicale. Ce n’est pas réfléchi à l’avance, je préfère cela, de plus je trouve que ça colle à la musique parfaitement. On est vraiment dans le même processus qu’un “one-shot” mais en moins hasardeux ! (rires)
Jorrit: Pour résumer c’est vraiment l’idée de “Comment vas-t’on faire pour transformer cette étincelle en brasier ?”
Je reviens sur l’atmosphère autour de vos morceaux, c’est très intéressant puisqu’en fonction des personnes, ils peuvent ressentir une certaine mélancolie, du bonheur ou même de la tristesse; Pour autant, aucun n’est capable de rester neutre, c’est ce que vous aviez prévus de réaliser en composant vos morceaux ?
Jorrit: Ce qui est intéressant avec notre musique c’est son adaptabilité. Quand tu es triste, la musique te rendra encore plus triste. Si tu es heureux, elle renforcera cette émotion ! Notre son fonctionne comme un caméléon, elle s’adaptera à vos émotions.
Marijn: J’aime beaucoup le fait que quelqu’un qui écoute notre album, revit ou vit sa vie avec “Eyes Closed” comme une bande originale. Nous l’avons composé pour que l’harmonie puisse convenir à tout le monde; Que chacun puisse ressentir sa propre émotion et écrire sa propre histoire.
HAEVN est un duo mais sur scène, invitez-vous des musiciens ou utilisez-vous des machines ?
Marijn: Nous avons des musiciens sur scène, Jorrit est au piano, je m’occupe du chant et de la guitare. Mais nous ne sommes pas seuls, ici pour Paris, il y aura un second guitariste, un batteur et un autre pianiste.
Cela diffère de notre formation habituelle, normalement nous tournons avec un orchestre comme à Amsterdam pour amplifier l’harmonie et la musicalité de nos morceaux.
C’est votre première date en France, quel est le sentiment qui prédomine actuellement ?
HAEVN: C’est beaucoup plus que ça, c’est notre première date à l’étranger, c’est très symbolique. On espère que les Français sur place apprécieront ! La France est un pays “d’artiste” , l’histoire l’a démontré et on est excités de pouvoir jouer ici.
Pour les gens qui vous découvrent, que souhaitez-vous leur dire ?
HAEVN: “Nous sommes le groupe HAEVN et on adorerait que vous preniez le temps d’écouter “Eyes Closed” en entier ! La meilleure manière de nous comprendre est de fermer les yeux et de vous laisser porter par la musique. Et n’hésitez pas à nous contacter pour en parler avec nous, on adore avoir des retours sur vos émotions.”
On remercie le duo HEAVN pour la qualité de leurs réponses. Ce groupe n’a pas fini de faire parler de lui par sa qualité mais aussi par son talent, on a hâte de suivre leur progression !